7.1 - Le cas particulier de l'équipe de deux










Quels sont les conseils que l'on peut donner à une équipe de deux personnes parcourant la montagne en hiver ? Nous allons les passer en revue, en suivant la chronologie de la sortie.

 

La préparation

Le matériel

L'itinéraire

Les précautions ê. prendre

En cas d'accident...

 

C'est. avec la sortie solitaire, le cas de figure le plus fréquent pour les agents des Parcs Nationaux effectuant leur tournée dans le cadre de leur activité professionnelle. Ceci justifie qu'une fiche spécifique soit consacrée au sujet.
Avant tout, il faut bien se persuader de la vulnérabilité particulière de l'équipe de deux. En cas d'accident, bien souvent les deux skieurs sont  emportés et il ne se trouve donc personne pour porter secours et déclencher l'alerte. Même s'il y a un rescapé, la situation n'en reste pas moins très critique. A moins de disposer d'une radio (avec quelqu'un à l'écoute), il lui sera impossible de déclencher l'alerte tout en commençant les recherches. Cette vulnérabilité accrue de l'équipe de deux lui impose des règles de prudence plus strictes permettant de diminuer les risques encourus.

 

La préparation

Tous les conseils concernant la prise d'informations avant le départ sont valables ici (voir fiche n° 2.2). Entre autres, on consultera les divers bulletins nivo-météorologiques et on fera une évaluation soignée des conditions de la montagne en fonction des jours précédents (vent, neige, soleil, redoux, pluie...).

Le matériel

Pour ce qui est du matériel à emporter, on se reportera à la fiche n° 2.1 (carte, boussole, altimètre, jumelles, trousse de réparation, pharmacie légère, couverture de survie...).

A deux, la radio devrait être systématiquement emportée. En cas de problème, le rescapé est tout seul pour tenter de sauver son coéquipier. Et la radio vous relie au monde extérieur. Ces dernières années, la radio a permis l'arrivée extrêmement rapide des sauveteurs, alors que le ou les rescapés procédaient aux premières recherches. On connaît même plusieurs cas de pisteurs ensevelis sous la neige qui ont donné l'alerte avec leur radio et ont guidé les sauveteurs jusqu'à eux.

Il est impératif que chaque skieur ait son ARVA et sa pelle. La pelle est un instrument qui sert assez peu, dont le poids est minime (600 à 800 grammes selon les modèles), mais qui est irremplaçable en cas de secours. Il est trop triste, et le cas est malheureusement arrivé plusieurs fois, d'être dans l'incapacité de dégager son copain parce que c'est justement lui qui a la pelle. On ne le redirajamais assez, la pelle est un outil individuel lorsque l'on est en nombre restreint.

L'itinéraire

Etant plus vulnérable, l'équipe de deux cherchera à minimiser les risques en choisissant un itinéraire plus sûr. Pour l'évaluation de ces risques, le lecteur consultera la fiche n° 4.1 et la fiche n° 4.4.
Le choix de cet itinéraire est important, et peut différer notablement de celui que l'on prendrait avec un groupe plus nombreux. En effet, une équipe de deux est souvent plus homogène, plus rapide et plus mobile qu'un groupe. Il est possible de minimiser certains risques qui sont directement liés au temps passé dans les passages exposés (chutes de pierres, de corniches, glissade sur plaque de glace, ... ). Au bénéfice d'une équipe légère, on note aussi la surcharge (plus faible) qu'elle exercera sur d'éventuelles plaques à vent. Au bénéfice d'une équipe experte, on créditera une moindre sollicitation des ancrages (des plaques) liées à une trace plus souple et sans conversion à la montée. plus directe (godille) et sans chute à la descente.

Les précautions à prendre

Là encore, il faudra toujours garder présent à l'esprit que l'équipe de deux est vulnérable. Chaque fois qu'un problème est sur votre route, il faut se poser la question : «si mon copain a un accident, suis-je en mesure de lui porter secours ?». Cette attitude systématique vous empêchera de vous mettre dans des situations délicates (barres de rocher, pentes raides et glacées, couloirs avec chutes de pierres, pentes douteuses, combe sur-enneigée,...). Bien souvent, vous opterez pour des solutions sages (ne pas «tenter le diable...), donnant une marge de sécurité importante.

Le lecteur se reportera à la fiche n° 4.5 pour l'ensemble des précautions à prendre pour assurer correctement sa sécurité en conditions avalancheuses. On n'oubliera jamais que la RADIO est un outil qui se révèle vital dans certains cas dramatiques. Pour assurer votre sécurité, il est souhaitable de passer périodiquement des messages surtout avant les passages jugés dangereux (« attention, nous allons passer une pente douteuse, nous vous rappellerons d'ici dix minutes »).

En cas d'accident

Malgré tout l'avalanche peut survenir. Que faire alors ?

Si vous êtes tous les deux emportés et plus ou moins ensevelis, vous ne pouvez compter que sur vos propres forces. Bien évidemment, si vous êtes reliés par radio et si celle-ci est accessible, vous demanderez du secours. Sinon, vous pourrez tenter de vous dégager tout seul. En cas d'impossibilité, vous vous efforcerez de conserver votre sang-froid ce qui aura pour effet d'économiser votre énergie en attendant l'arrivée des secours. Ceux-ci pourront avoir été prévenus par votre interlocuteur radio inquiet de l'interruption des vacations.

Si une seule personne est emportée et ensevelie, le rescapé est partagé entre deux impératifs souvent incompatibles : la nécessité de donner immédiatement l'alerte et celle de porter secours au blessé. Cruel dilemme.

Plusieurs cas de figure sont à distinguer :

  • vous êtes équipés correctement (ARVA, pelle, bâtons-sonde, radio)

La première chose à faire est de donner l'alerte par radio, en priant le ciel pour qu'un correspondant soit bien à l'écoute. Si vous avez pris la précaution de converser avec lui pendant la sortie, vous savez qu'il est à l'écoute.

L'alerte est une chose importante (voir la fiche n° 6.2). On a trop souvent tendance à minimiser l'accident, parfois même à ne pas demander les secours «pour ne pas déranger inutilement». Sachez que le temps joue contre vous (et surtout contre la vie de la victime). Si votre copain a disparu sous la neige, c'est de toutes façons une affaire très grave (il n'a statistiquement qu'une chance sur deux d'être retrouvé vivant). Mobiliser un hélicoptère avec une équipe cynophile n'est jamais un luxe pour une telle situation. Si, lorsque l'hélico arrive, le disparu a été retrouvé en bonne forme apparente, les sauveteurs ne vous en tiendront jamais rigueur. La victime sera alors rapatriée par la voie des airs sous surveillance médicale.

L'alerte donnée, vous opérez la recherche de la victime à l'aide de votre ARVA. Notez que vous n'êtes alors plus protégé en cas de nouvelle avalanche. On se reportera aux fiches n° 6.3 et n° 6.4 pour le sauvetage lui même, et aux fiches n° 3.2 et n° 3.3 pour le maniement de l'ARVA.

  • vous n'êtes pas équipé d'ARVA ni de radio, mais les secours potentiels sont très proches (moins de 10 à 15 minutes)

C'est un cas assez rare dans les Parcs Nationaux, excepté au départ d'une course ou près des remontées mécaniques, lorsque l'ARVA est resté à la maison...
Après avoir jeté un rapide coup d'oeil (et d'oreille), pour vous assurer que la victime n'est ni visible ni audible, vous allez chercher les secours. Sachez que chaque minute perdue joue contre la vie du disparu. Ne sous-estimez pas le temps nécessaire pour donner l'alerte. Remontez avec les sauveteurs pour leur donner toutes les informations que vous possédez (lieu de l'accident, trajet de l'avalanche, dernier endroit où vous avez vu la victime...). Vous êtes le seul témoin de l'accident et votre témoignage est capital (voir la fiche n° 6.5).

  • vous n'êtes pas équipé d'.ARVA ni de radio et les secours sont éloignés

La vie de votre coéquipier peut dépendre en grande partie de votre comportement. Donnez-vous 20 à 30 minutes pour essayer de retrouver le disparu, en cherchant «frénétiquement et désespérément» les endroits les plus probables où la victime peut se trouver. Ce sondage de fortune ne doit pas se faire au hasard, mais dans les zones dites préférentielles : amont des obstacles (arbres, rochers ... ), replats et terrasses, talwegs, fond de combes et ruisseaux, bords de l'avalanche. Utilisez un de vos bâtons débarrassé de sa poignée pour faire ce sondage sommaire mais souvent efficace. En effet, plus de la moitié des ensevelis l'est sous moins de un mètre de neige. Et faites le plus vite possible car Ies chances de survie diminuent de moitié toutes les heures. C'est précisément pour cela qu'il vaut mieux passer la première demi-heure à rechercher le disparu (chances de survie élevées) plutôt que de courir déclencher l'alerte et de remonter avec les secours (les chances de survie sont alors bien moindres). On se reportera à la fiche n° 1.4 qui expose l'évolution des chances de survie d'un enseveli en fonction de la durée et de la profondeur.

Si au bout d'une demi-heure le disparu n'a pas été retrouvé (avalanche énorme, profondeur supérieure à 1 mètre, grande difficulté pour sonder...), partez donner l'alerte en étant conscient que les secours ne seront probablement pas sur place avant une heure. Balisez de manière non équivoque (anorak bloqué dans la neige, bâton ou ski, ... ) le lieu de disparition afin que les secours ne perdent pas de temps pour commencer les recherches. En effet, le mauvais temps peut arriver, vous pouvez ne pas remonter sur place et les recherches s'orienteront à partir de ce marquage.